J’ai découvert l’existence de la douceur de la foi par Ahmad ibn Yusuf al Sayyid

Le docteur Farid al-Ansari écrit dans son livre l’esthétique de l’islam « J’ai commencé à remettre en question toute ma vie.  J’ai vraiment découvert l’existence d’une chose appelée  “douceur de la foi” : une chose qui relève du goût et non  de la théorie, une chose réelle et non le fruit de l’imagination! Puis, j’ai commencé à revenir au Coran et je me  suis rendu compte que j’étais très éloigné de sa splendeur  et de sa beauté. J’ai commencé à revenir à la Sunna et je  me suis aperçu que j’étais le plus ignorant des gens au  sujet des qualités morales de Muhammad, que soient sur  lui la prière et le salut d’Allah. Je me suis mis à revoir  ce que j’avais déjà lu au sujet de la croyance (islamique)  et j’ai découvert des pages rayonnantes sur ce qu’avaient  écrit les pieux prédécesseurs. J’étais passé dessus comme  un aveugle — et non de façon noble — du fait d’un voile  de préjugés qui couvrait ma vue. C’était comme si je ne  les avais jamais lus [de toute ma vie]! Je [me] disais : “Ma  surprise n’est pas tant intellectuelle qu’émotionnelle !”  [Avant ça], je lisais des termes comme “amour”, “passion  (amoureuse)”, “peur”, “espoir”, etc., sans qu’elles suscitent  le moindre souffle de vie dans mon cœur.» 

Le docteur Farîd, qu’Allah lui fasse miséricorde,  a démontré à travers ses propos qu’il n’incriminait pas  sa compréhension précédente, mais il dit plutôt que  les conditions d’apprentissage étaient difficiles. Et pour  éviter toute ambiguïté, je vous rapporte ses paroles  concernant l’explication de la divinité, de la déification et de l’adoration. Il dit : «Dans son utilisation originelle  en langue arabe, le mot ilâh (divinité) est un terme “chaleureux” et chargé d’émotions. J’entends par là que c’est  un des termes qui indiquent les états du cœur comme  l’amour, la haine, la joie, la tristesse, le chagrin, le désir  amoureux, la crainte, etc. 

En ce qui concerne l’étymologie de ilâh, les Arabes  disent aliha al-fal, ya’lah alahan, en référence au fal qui  pleure par amour pour sa mère. Le fal est le chamelon  qui vient d’être sevré et qui cesse de téter. Il est retenu  dans la tente pendant qu’on laisse sa mère paître. Quand  l’attente devient trop longue pour lui, il se souvient que  sa mère [lui manque], et il est pris de nostalgie et de ten dresse envers elle, alors qu’il vient tout juste d’être sevré1.  Il se met donc à gémir et à blatérer comme s’il pleurait.  Les Arabes disent alors aliha al-fal. Sa mère, ici, est son  ilâh au sens linguistique, c’est-à-dire l’être pour lequel il  éprouve de l’amour. Le vers suivant d’un poète va dans le  même sens : “Je tenais tellement à elle que les caravanes  se sont immobilisées”.» 

Puis il dit : 

«Ainsi voit-on que ces deux éléments, aliha et waliha, ont une signification affectueuse qui renvoie, dans l’ensemble, à [la notion de] dépendance émotionnelle et de plénitude affective. En disant cette parole : “Il n’y a pas de  divinité mis à part Allah”, le croyant exprime ce qu’il ressent  dans son cœur comme attachement envers son Seigneur,  le Très-Haut, c’est-à-dire : il n’y a personne [qui mérite véritablement d’être] aimé mis à part Allah, il n’y a personne  [qui mérite véritablement d’être] craint mis à part Allah.  Et rien ne doit remplir le cœur mis à part la volonté de  plaire à Allah. Cela ressemble au chamelon qui est pris  de nostalgie et de tendresse envers sa mère, car il souffre  d’être loin d’elle et elle lui manque. Quand le musulman  témoigne qu’il n’y a pas de divinité mis à part Allah, il  admet, en témoignant de ce qui se trouve dans son cœur,  qu’il ne s’attachera qu’à Allah; par espoir, peur extrême,  passion et amour. C’est là un témoignage solennel et grave,  car c’est une confirmation, une reconnaissance et l’aveu  d’un sentiment sincère. On ne peut jamais être sûr de la  crédibilité [et établir] la véracité à part Allah seul; puis  vient la personne qui témoigne elle-même (de sa véracité).  Or, ce qu’éprouve le cœur, aucun mot ne peut le cerner et  aucun geste ne peut le limiter. À partir de là, “Il n’y a pas  de divinité mis à part Allah” est un témoignage d’une délicatesse de haut rang qui ne peut être parfaitement perçue  que par le goût.» 

Puis, il transmet une parole aussi extraordinaire que  magnifique d’Ibn al-Qayyim sur l’amour. Il dit : « Si la question de l’amour s’évanouit, toutes les  étapes de la foi et de la perfection s’écroulent. Toutes  les positions qui jalonnent le chemin menant à Allah disparaissent. L’amour constitue l’âme de toute étape, de  toute position et de toute œuvre. Vidées d’amour, elles sont  réduites à un corps sans vie et sans âme. Son lien avec les  bonnes actions est proportionnel à son lien à la sincérité.  Bien plus, il représente la véritable sincérité. Bien plus  encore, c’est l’esprit même de l’Islam. Car l’Islam n’est  venu qu’avec l’humilité, l’amour et l’obéissance à Allah.  Celui qui est privé d’amour, il n’a pas du tout d’Islam.  C’est la véritable concrétisation du témoignage qu’il n’y  a pas de divinité mis à part Allah, car la divinité est celle  que les adorateurs divinisent par amour, humilité, crainte,  espoir, glorification et obéissance, selon le sens de ma’lûh (l’Adoré) qui est Celui que les cœurs divinisent, c’est-à dire qu’ils L’aiment et s’humilient devant Lui […] » Ce qui est voulu à travers ce sujet, c’est que l’Islam  ne peut être compris que lorsqu’on comprend ce qu’est  la véritable servitude ainsi que la position, les sentiments  ou encore les croyances qui accompagnent l’Homme vers  son Seigneur lorsqu’il accomplit les actes d’adoration  qu’Allah, glorifié et élevé soit-Il, a légiférés. C’est pour  cela qu’al-‘Izz Ibn ‘Abd al-Salâm dit dans ses Règles : «Ce  qui est voulu à travers tous les actes d’adoration, c’est de  magnifier Allah, de Le glorifier et de Le sublimer.» Donc, si la personne arrive à saisir parfaitement cette  conception, elle parviendra à une représentation des vertus  de l’Islam dans laquelle se trouvent les significations les plus nobles de la beauté du cœur. Pourtant, cela ne dis pense pas de la délectation par la véritable mise en action  de cette beauté, car l’information théorique n’est pas  comme la mise en pratique. L’Islam possède une nature  particulière qui se démarque de toute idéologie que les  gens tiendraient pour vraie, car celui qui s’acquitte de  l’adoration d’Allah telle qu’Il l’a voulu, en y excellant  avec science et bonne compréhension, Allah lui accordera certainement une belle vie, une connaissance plus  exhaustive, une lumière dans le cœur et un bonheur dans  l’âme qu’on ne pourrait décrire avec des mots dévoilant  ce qui s’y trouve (dans la pratique). Comme l’a dit un  dévot : « Nous vivons un plaisir et un bonheur tels que  si les rois et les fils des rois avaient eu connaissance de ce  que nous expérimentons, ils nous auraient certainement  combattus par l’épée.» 

Extrait du livre Les vertus de l’islam du cheikh Ahmad ibn Yusuf al Sayyid, Al Bayyinah 2022